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L'exposition du centenaire de la guerre 14-18 à Mons-en-Barœul


Les vues présentées ici sont exceptionnelles. Retrouvées par l’association Eugénies, elles ont été prises, il y a une centaine d’années, le même jour, durant la guerre 1914-1918, par un photographe originaire de la ville de Dresde en Allemagne.

On est en présence d'un reportage complet sur le Fort Macdonald de Mons-en-Barœul. Quel était le statut de ce photographe. Il s'est promené un peu partout, probablement accompagné par un représentant de l'autorité militaire. Se  pose la question de sa marge de manœuvre et de savoir s'il a pu faire des images de choses qu'il ne vaut mieux pas montrer. On peut faire l'hypothèse que non.

Sur les photos de soldats français au front pendant la guerre de 14-18, provenant de secteur très durs, on y voit les soldats au repos, jamais au combat. Ces photos étaient interdites par l'état-major. Du côté allemand, la production d'images était également très surveillée. Il était interdit aux français d'en prendre et surtout de les expédier dans la zone libre. Ce photographe de Dresde avait une autorisation du grand quartier général. Pour quelle raison ? On peut penser qu'il travaillait pour l'armée ou bien pour la presse. L'édition en carte postale semble indiquer un statut d'indépendant.

Ce photographe a du utiliser un appareil de la marque Ernemann. C'était l'une des trois sociétés présente à Dresde à cette époque, qui était la capitale mondiale de la photographie.



Cette photographie se retrouve à l’emplacement où elle a été prise il y a presque 100 ans, pendant la première guerre mondiale. Trois officiers, de l’armée allemande qui occupe le Fort de Mons-en-Barœul, posent devant une pyramide de 55 boulets. L'entrée et la voûte étaient donc blanchies à la chaux, avec un revêtement goudronné en bas. On découvre plusieurs maximes germaniques encourageantes et on en devine une autre derrière la porte, sensiblement à l'emplacement où se trouve actuellement la plaque consacrée à l'Architecte David.
Au dos de cette photo figure la légende : « Im Kehleingang des Forts Macdonad ». Ce qui signifie : « Dans l’entrée de gorge du Fort Macdonald ».
L’entrée du Fort était protégée par une grille, en plus de la partie dressante du pont. A la différence de la situation actuelle, l’énorme porte en bois rivetée se situait entre le sas d’entrée et le couloir d’accès. Son système d'ancrage au sol a été mis à jour en 2006. L'énorme pierre qui s’y trouvait repose actuellement dans la cour sud. Il y avait aussi des trottoirs dans le sas de l'entrée, avec des carreaux jaunes de Jurbisse. Un chasse-roue est visible derrière l’officier de droite. On remarque 3 des 8 meurtrières qui protégeaient ce poste de garde à l’entrée de la caserne de gorge.
Les boulets étaient destinés à être tirés par des mortiers de 32 dits « mortiers de sièges » au tir surplombant les fossés et utilisés en défense contre les assaillants rapprochés sur le glacis ou la contrescarpe. Même obsolètes, cela faisait partie de l'armement traditionnel des Forts à cette époque. Mais ici cet amoncellement est uniquement décoratif.
© Association Eugénies

Cette photographie, éditée en carte postale, par Emil Mehlhorn, fait partie d’une série retrouvée, à Dresde en Allemagne, par l’association Eugénies. Elle montre l'armée allemande occupant le Fort de Mons-en-Barœul, durant la première guerre mondiale. Si l’endroit ne nous était aussi familier, on se croirait au cœur de l’Allemagne, durant un bel après-midi d’été. Le Fort semble accueillant. Des arbustes décoratifs sont disposés sur le pont, où trois officiers prennent la pose. La grille en fer forgé est grande ouverte.

Sur le mur du fond, dans la cour centrale, est peint l'aigle à deux têtes1 et au-dessus de la porte d'entrée on trouve une représentation de la Croix de Fer2 entourée d’une inscription en gothique allemand signifiant la fierté d'être allemand et la grandeur de l'Allemagne.

A droite, est inscrit : « Ich frue nur noch Deutsch » qui signifie « Mon unique fierté est d’être Allemand ». Elle est une affirmation de la supériorité supposée de la nation allemande sur tout le reste du monde. A gauche, on peut lire : « Ich frue kein partienien », ce qui signifie : « Je suis fier de n’appartenir à aucun parti ». Si on accole les deux inscriptions on peut penser qu’il s’agit d’une déclaration patriotique qui signifierait : « Je ne suis ni dépendant d’un parti ni d’un système de pensée ». L’Allemagne et la qualité d’être Allemand priment sur tout le reste et provoquent la fierté du soldat.

1 - L'aigle à deux têtes, est le symbole présent sur les armoiries de Guillaume, empereur d'Allemagne
2 - La Croix de Fer (Eisernes Kreuz) est une décoration militaire allemande qui fut établie comme un honneur militaire par le roi Frédéric-Guillaume III de Prusse en 1813 lors des guerres napoléoniennes. Au XXe siècle, elle est le symbole de la Bundeswehr.

© Association Eugénies


Cette vue représente des prisonniers civils dans la grande cour, dite cour centrale ou cour des casernes, du Fort Macdonald. Regardez-la bien ! Votre grand-père ou votre arrière-grand-père figure peut-être sur le cliché. On est frappé par la jeunesse de certains personnages, quelques uns ne sont encore que des gamins.

En cette fin d’après midi, le photographe a placé son appareil face à l’actuelle bibliothèque. Sur cette façade trône un panneau avec l’aigle à deux têtes. L’image est soigneusement mise en scène avec l’étagement des plans, la disposition des hommes, les attitudes improbables des jeunes gens du premier rang, cigarette à la main. La présence de l’occupant est seulement indiquée par un gradé en tenue blanche, pipe à la bouche. Cette image appartient à la propagande allemande. Elle suggère que les prisonniers civils sont bien traités dans la zone occupée.

On sait par ailleurs qu’il n’en était rien pour les prisonniers militaires et notamment pour les australiens détenus au Fort, dont les conditions de détention furent éprouvantes. L’un d’eux raconte dans ses mémoires : « La nourriture (ou son manque) occupait les esprits des hommes. Beaucoup mâchaient des orties ou de l’herbe pour supprimer les douleurs de la faim dues à un travail pénible et aux maigres rations de pain noir et d’ersatz de café ».

On sait que les Allemands arrêtaient  beaucoup de monde. Certains étaient désignés comme otages pour dissuader la population de participer à des actions de résistance. Cette catégorie de prisonniers était plus volontiers déportée vers l'Allemagne ou la Lituanie ou envoyée par roulement à la Citadelle de Lille.
© Association Eugénies


Cette vue représente la distribution de la soupe, avec des prisonniers civils, dits brassards rouges, répartis en deux files, tenant des gamelles. On se trouve dans la cour centrale, dite cour des casernes. L'ensemble des prisonniers est en rang. Sur la droite, un petit groupe fait la queue devant la porte qui est l'actuel accès aux cuisines du Restaurant du Fort ! Parmi ces hommes certains sont âgés d’autres à peine adolescents.

Un militaire allemand, en tenue blanche, est debout derrière un caisson de protection d'une pompe à eau, sur lequel une pancarte porte la mention « Kein Trinkwasser », ce qui signifie « Eau non potable ».

Plusieurs détails sont intéressants à remarquer comme les vêtements, les pavés de la cour, les trottoirs, la végétation et les inscriptions. Sur une pancarte au dessus de la porte on lit l'inscription « Küche II », ce qui signifie « Cuisine n° 2 » et une autre sur le mur mais qui n'indique certainement pas le menu du jour ! Une première cuisine située dans l'angle opposé était réservée aux allemands.

Le Fort est très propre, des caillebotis ont été placés devant les portes pour se secouer les godillots avant d'entrer. Les encadrements de fenêtres et de portes et les menuiseries ont été peints en blanc. Ceci met bien en évidence les rainures destinées à recevoir les plaques de protection des ouvertures en cas de guerre et dans le cas présent, elles ne sont pas en place, car le front est loin. Visible sur la gauche, un passage mène à la cour sud, (actuellement vers la salle de projection et le Jardin de Thalie).

© Association Eugénies


Cette vue prise par un militaire allemand, lors de la première guerre mondiale, montre le fossé sud-ouest du fort Macdonald de Mons-en-Barœul. La photo a été prise depuis la contrescarpe au niveau du saillant 4. Les deux rangées d'arbres n'existent plus, à l'inverse le sommet du fort est dégagé de toute végétation.

On remarque dans le fond du fossé les deux cunettes de drainage, de part et d'autre. Au fond, on distingue parfaitement dans l'alignement du fossé, derrière la partie fixe du pont (le pont dormant), la batterie de flanquement qui protège ce fossé. Ses canons prennent en enfilade la défense de cette zone en tir croisé avec les canons de la batterie opposée. La passerelle du pont levis marque de son ombre la façade de la caserne de gorge. Au bas de celle-ci et sous le pont, on remarque bien la petite poterne d'accès au fossé. La portée de l'ombre montre que cette vue a été prise l'après midi.

Cette partie droite du Fort correspond à l'arrière des constructions de la cour sud actuellement occupée par des locaux associatifs. Le talus (escarpe) est dit à « terre coulante ». En effet, il ne possède pas de maçonnerie ni de murs avec des arcs de décharge comme on le voit en vis à vis, et le bas de celui-ci est protégé au niveau du fossé par une lourde grille qui le ceinture. Le rideau d'arbres assez imposant n'était pas gênant en soi. Il est situé à l'ouest du Fort et il n'y avait pas de banquettes de tirs à cet endroit orientées dans cette direction. Le bas de l’escarpe est protégé par une grille. Sur le dessus de la caserne de gorge (parados) on distingue les cheminées d’aération et celles des puits de lumière munies de leurs verrières.



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Sur cette vue plongeante de l’entrée du Fort prise pendant la première guerre mondiale, on remarque qu’il n'y a aucun arbre, à la différence de la situation actuelle. L'absence de végétation offre une vue imprenable sur le remblai de la caserne de gorge, avec ses nombreux puits de lumière et autres cheminées de ventilation et où s’élève également un mat porte drapeau.

Certains détails nous précisent que nous nous trouvons en milieu de journée et à la saison chaude, les fenêtres des salles de garde sont grandes ouvertes pour laisser entrer soleil et chaleur. Les soldats s'y montrent. On remarquera que les fenêtres à ce niveau ne sont pas munies de barreaux comme actuellement. Le Fort « inspire confiance » et ne renvoie par l'image d'une prison.

Une balustrade ceinture le fossé sur la contrescarpe. Son motif en vagues est plutôt esthétique et contribue à rompre la monotonie linéaire d'un tel assemblage. La peinture blanche de la voûte d'entrée apparaît nettement ainsi que les grilles largement ouvertes. Les murs, on le sait étaient recouvert de chaux, tandis que le bas des murs était goudronné.

Trois pyramides de boulets, aujourd'hui disparues, décorent au-dessus de l'entrée le sommet du fronton. Autre détail intéressant, la vue semble prise légèrement en surplomb, au sommet du ravelin, actuellement disparu. Le photographe s'est positionné au sommet du talus de droite pour réaliser son cliché, soit sensiblement à l'emplacement de l'actuelle salle des fêtes du Fort.

© Association Eugénies


Ce tableau, peint en 1918, représentant le Fort Macdonald de Mons-en-Barœul est exposé à l'Impérial War Museum de Londres. Notre ami australien Aaron Pegram*, nous a fait découvrir cette peinture d'Edwin Martin intitulée « Le trou noir ». Elle fait allusion à un épisode pitoyable où des prisonniers australiens furent enfermés dans ce lieu.

En 1917, près de Bullecourt (Pas-de-Calais), plusieurs centaines de soldats australiens sont fait prisonniers, dont 500 seront détenus au Fort de Mons dans des conditions particulièrement indignes. Parmi eux se trouvait l’arrière-grand-père d’Aron Pegram, le private Oswald Mc Clelland, du XIIIe bataillon, qui, malgré tout, pu rentrer vivant au pays.

Au Fort de Mons, l'armée allemande maltraitait volontairement les prisonniers, les privant de nourriture, leur infligeant des sévices, les laissant mourir sans soins des suites de leurs blessures. Certains devinrent fous et la plupart sombrèrent dans des idées noires. Cette violation délibérée des conventions internationales était une réponse à l'usage fait par l'armée française de prisonniers allemands envoyés au travail dans les zones de combat. Beaucoup des prisonniers australiens du Fort de Mons, contraints à leur tour aux travaux forcés sur la ligne de front, périrent sous les obus amis.


*Aaron Pegram, historien à l'Australian National University de Canberra, auteur d’une thèse de doctorat sur les 3 861 soldats australiens fait prisonniers par l'armée allemande sur le front occidental, est actuellement le rédacteur en chef de la revue australienne War Time.


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